PLANCHE 94 & 95.

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S E C T I O N   S E C O N D E.

De la Construction des Buffets d'Orgues.



     A P R È S les connoissances générales que je viens de donner touchant la forme & la décoration des buffets d'orgue, il est très-nécessaire d'entrer dans le détail de leur construction, afin de joindre la solidité à la propreté, ce qui est mon principal objet.

     Si la solidité est nécessaire aux ouvrages de Menuiserie, il est certain que les buffets d'orgue en exigent beaucoup plus que tout autre, puisque le moindre [p. 252.] ébranlement est capable de déranger toute la mécanique de cet instrument, ou du moins l'endommager beaucoup ; c'est pourquoi les Menuisiers ne sauroient prendre trop d'attention en déterminant les formes d'un buffet d'orgue, la qualité & la grosseur des bois, & les différents assemblages qu'ils doivent y employer.

     Avant de parler de la construction d'un buffet d'orgue, il est bon d'observer que son intérieur doit être uni de tous côtés, sans qu'aucune partie y soit saillante ; qu'il faut, autant qu'il sera possible, mettre des bois de longueur, sur-tout aux traverses qui forment les architraves ou qui les portent, afin d'empêcher l'écartement du bâtis de la carcasse du buffet.(*)

     On nomme carcasse le bâtis d'un buffet d'orgue : elle est composée de montants & de traverses, & dans les grands buffets elle est séparée en deux parties sur leur hauteur.

     Les bois de ces bâtis doivent avoir 2 pouces [54 mm.] d'épaisseur aux plus petits buffets d'orgues, & 5 à 6 pouces [135 à 163 mm.] aux plus grands, & être d'une largeur relative à la place où on les emploie ; c'est-à-dire, qu'il faut qu'ils aient de largeur, premiérement le champ, plus l'embreuvement ou la moulure, si cette derniere n'est pas ravalée, ce qui est plus solide. (Voyez les Fig. 4, 5 & 7, de la Pl. 95).

     Quant à la largeur des champs, elle varie depuis 3 à 4 pouces [81 à 108 mm.] jusqu'à 6 [163 mm.], selon la grandeur de l'ouvrage.

     Pour ce qui est des traverses, elles doivent avoir une même largeur de champ & de moulure que les battants ; & si l'on craignoit que cette largeur ne fût pas suffisante pour faire un assemblage solide, on les feroit plus larges de 3 à 4 pouces [81 à 108 mm.], & on les ravaleroit par-devant jusqu'au fond de la rainure du panneau, de maniere qu'on y feroit un double assemblage, ce qui seroit plus solide.

     En général, un buffet d'orgue, du côté de la montre, est composé de montants qui portent sur le sol de la tribune, & qui sont assemblés en chapeau dans la traverse qui porte l'architrave, laquelle regne de toute la largeur du buffet, pour en empêcher l'écartement, ainsi que je l'ai dit ci-dessus. Lorsque les buffets sont d'une trop grande longueur pour que ces traverses soient d'une seule piece, on les rallonge à traits de Jupiter, en observant toutefois que ce dernier ne se trouve point dans les assemblages qui se font dans ces traverses. Pour ce qui est de leur largeur, ce sera celle de l'architrave, afin qu'ils aient le plus de largeur possible, & pour donner plus de solidité à l'ouvrage.

     L'ouverture ou la fenêtre du milieu du massif, doit avoir 6 pieds [1 949 mm.] de haut sur 3 pieds 6 pouces de large [1 137 mm.] ; & on doit y placer une traverse, dont le dessus doit être à la hauteur de 3 pieds [975 mm.], laquelle traverse sert à poser les claviers à la main.

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     Il ne faut point mettre de traverse par le bas de cette fenêtre, parce qu'elle nuiroit aux machines qui correspondent aux claviers des pédales ; on n'y met seulement qu'une traverse par le haut, laquelle reçoit un panneau qui monte jusqu'à l'architrave ; ce panneau est plus ou moins haut, selon la grandeur de l'orgue : il y en a qui ont jusqu'à 8 pieds [2.6 m.] de hauteur, ce qui est nécessaire pour placer intérieurement les abrégés & toute la mécanique qui se trouve comprise entre les claviers à la main & les sommiers. Les panneaux qui remplissent le reste de la face du massif, entrent à rainures & languettes dans des cadres qui sont eux-mêmes embreuvés dans les montants du massif ; mais il vaudroit mieux que ces moulures fussent prises à même le montant, ce qui seroit plus solide, ainsi que je l'ai dit plus haut. Quant aux traverses de ces panneaux, elles s'assemblent séparément entre les montants de la carcasse, chacune selon la largeur du panneau, & redescendent de toute leur largeur en contre-bas de la traverse qui porte l'architrave, dans laquelle traverse elles entrent à rainure & languette.

     Lorsque le buffet d'orgue n'est pas d'une grandeur considérable, on prend la saillie de l'architrave aux dépens de la traverse, ce qui vaut mieux que de la rapporter. En général, on ne fait point de tenon par le bout de cette traverse, mais des mortaises, parce qu'elles servent comme de base au reste du buffet. La traverse du dessus de celles dont je viens de parler, doit aussi avoir de longueur toute la largeur de l'orgue ; & elle ne differe de la premiere, qu'en ce qu'on y fait des tenons par les bouts, lesquels entrent dans les montants des tourelles des angles : cette traverse sert à porter la corniche ; & on peut, lorsque cette derniere n'est pas considérable, la prendre dans la même piece ainsi que l'architrave. La traverse qui porte la corniche, s'assemble avec celle qui porte l'architrave, par des montants qui ont de hauteur la largeur de la frise, & que l'on place à l'à-plomb de chaque montant des tourelles. L'espace qui se trouve entre la frise, la corniche & les montants reste vuide, ou pour mieux dire, la frise se leve pour pouvoir travailler aux sommiers, & on ne fait point de feuillures pour soutenir les frises rapportées ; mais on y met des taquets de distance en distance, afin de ménager la largeur. Voy. la Fig. 3, dont la moitié représente la carcasse d'un buffet d'orgue dépouillé de tous ses ornements.

     Les entablements des massif qui soutiennent les tourelles, se rapportent en trois parties différentes ; savoir, l'architrave, la frise & la corniche : l'architrave & la corniche s'assemblent à clefs dans les traverses droites du bâtis, lesquelles clefs passent dans des mortaises, cote a a, Fig. 3. La coutume étoit de faire passer les clefs au travers des traverses du bâtis, & on les arrêtoit par derriere avec d'autres clefs qui passoient au travers ; mais la saillie de ces dernieres nuisoit à l'intérieur de l'orgue, en empêchant les sommiers d'approcher assez près ; c'est pourquoi il vaut mieux couper ces clefs au nud des traverses, & les arrêter avec ces dernieres par des boulons de fer, auxquels on fera des têtes pour pouvoir les retirer. Voyez les Fig. 5 & 6, de la Pl. 95 dont l'une représente la coupe de [p. 254.] l'entablement d'un massif soutenant une tourelle, & l'autre le plan de cette même tourelle avec la place des clefs & des boulons. On peut aussi soutenir toute la masse des tourelles par des barres de fer que l'on entaille & attache tant dessous l'architrave, que sur le pilastre qui se trouve dessous. Cette barre se trouve cachée par les ornements que l'on met au-dessous des tourelles, ainsi qu'on peut le voir dans les Fig. 1 & 2, Pl. 94. & 5, Pl. 95.

     Les frises des tourelles se levent aussi ; c'est pourquoi on les fera de bois évidé, selon leur cintre ; & pour plus de solidité, on les construira de plusieurs pieces de bois assemblées à traits de Jupiter, si les tourelles sont d'un grand diametre, ou bien en flûte ou à entaille, si le diametre est trop petit pour faire des assemblages.

     La corniche & l'architrave qui portent les tourelles, se font en plein bois, à moins qu'ils ne soient d'une trop grande hauteur, alors on les fait de plusieurs pieces de bois collées en flûte, & on remplit le dessus & le dessous par un fond de bois de forte épaisseur.

     On met aussi entre l'architrave & la corniche un montant qui sert à soutenir cette derniere ; ce montant se place environ au tiers de la saillie de la tourelle, & on le fait le plus petit possible, afin qu'il embarrasse moins ; c'est pourquoi on fait très-bien de le faire en fer. (Voyez la Fig. 5, Pl. 95).

     Les tourelles restent vuides de toute leur hauteur, leurs montants étant assemblés par le bout d'en-bas dans la corniche du massif, & par le haut dans leur entablement, lequel est bâti tout d'une seule piece, de sorte qu'il couronne toute la tourelle tant sur la largeur que sur la profondeur qui est égale à celle de l'orgue. (Voyez les Fig1, 2, 3, & 4).

     Lorsque les tourelles seront d'une grandeur un peu considérable, on fera très-bien d'y assembler par derriere de leurs montants de face des traverses à environ 2 pieds [650 mm.] les unes des autres, lesquelles serviront à retenir l'écart des montants, & en même tems d'échelle pour pouvoir travailler aux tuyaux ; cependant que les tourelles soient grandes ou petites, on doit toujours y mettre une traverse par le haut, ainsi qu'on peut le voir dans la Fig. 3.

     Les claire-voies des tourelles ne doivent pas être collées à bois de fil ainsi que les corniches ; mais au contraire elles doivent être du même sens que les montants, de plusieurs morceaux joints ensemble avec des languettes rapportées, telles enfin que des douves de tonneaux, afin qu'elles soient plus solides & plus aisées à travailler.

     On doit aussi avoir soin de donner au Sculpteur des chantiers de la même forme que le dedans des claire-voies des tourelles, afin qu'elles portent par-tout également en les travaillant, & que le contre-coup ne les fasse pas fendre.

     Ces claire-voies entrent à bois de bout dans le dessous des entablemens des tourelles, & à feuillures sur les montants auxquels elles affleurent en dedans, & où elles sont attachées avec des vis. (Voyez les Fig1, 2 & 3, Pl. 95).

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     Pour rendre ces claire-voies plus solides, on peut les garnir en dedans avec de la grosse toile collée ou avec du nerf de bœuf battu, & même y attacher en dedans une bande de fer mince, laquelle seroit attachée par ces extrémités sur les montants.

     Comme les tuyaux des tourelles doivent être d'à-plomb, comme je l'ai déja dit, on est obligé de mettre en dehors toute l'épaisseur des claire-voies des tourelles, de sorte que le champ à cet endroit se trouve plus étroit de cette épaisseur ; ce qui fait assez mal, vû que le champ est déja très-étroit, ce qui alors diminue beaucoup le ressaut de la corniche, ainsi qu'on peut le voir dans les Fig. 1, 3 & 6, cote a, Pl. 95.

     Pour remédier à cet inconvénient, j'ai imaginé de faire le montant plus large, & d'y pousser sur l'arrête une moulure d'une largeur égale à l'épaisseur des claire-voies, de sorte que ces dernieres se trouvent placées sans interrompre le champ en aucune maniere. (Voyez les Fig. ci-dessus, cote b.)

     Les plates-faces n'ont aucuns bâtis qui leur soient propres, puisque c'est les deux montants des tourelles qui leur en servent, & dans lesquels s'assemblent des traverses qui font inclinées selon que l'exige la pente des tuyaux. Ces traverses s'assemblent en décharge dans les poteaux montants des tourelles, afin qu'elles les soutiennent mieux. On fait toujours affleurer le devant de ces traverses avec les montants ; cependant, je crois que malgré l'usage on feroit très-bien de les renfoncer de l'épaisseur des claire-voies, afin que ces dernieres ne débordent point sur le nud des champs(**), ce qui feroit d'autant mieux, que l'on pourroit pousser une moulure sur le montant de la tourelle du côté de la plate-face, ainsi qu'on l'a fait du côté de cette même tourelle.

     Comme les claire-voies des plates-faces sont souvent très-larges & ont beaucoup de retombée, il est nécessaire de les faire de plusieurs morceaux, afin qu'elles soient moins sujettes à se fendre. Il est bon aussi d'y assembler les retombées à bois de bout en forme d'emboîtures, afin que les chûtes d'ornements, comme guirlandes & autres, ne soient point exposées à se casser ; il est bon aussi de garnir ces claire-voies de toile, ainsi que celles des tourelles, afin de les rendre plus solides.

     Lorsqu'un buffet d'orgue est d'une forme cintrée sur le plan, c'est à-peu-près la même chose que quand il est droit ; mais il est moins solide, parce que les traverses courbes que l'on y emploie ne sont jamais aussi fortes que les droites ; c'est pourquoi il est bon de faire ces traverses plus épaisses qu'à l'ordinaire, & de les assembler à traits de Jupiter.

     Il y a même des buffets d'orgues qui non-seulement sont cintrés sur le plan, mais même sur l'élévation, & dont le bas des tourelles & des plates-faces n'est pas de niveau ; dans ce cas, il est bon de rapporter le lambris du massif sur la [p. 256.] carcasse du bâtis qui alors monte de fond, & auquel on fait toujours des traverses à l'ordinaire ; & pour donner plus de solidité à cette carcasse, on en lie toutes les parties avec des bandes de fer que l'on entaille dans l'épaisseur des bois, & que l'on attache avec des vis(***).

     Les côtés des buffets d'orgues n'ont rien de particulier dans leur construction, si ce n'est que quand ces mêmes cotés sont en porte-à-faux, ce qu'ils excedent du massif est porté par des courbes cintrées en S, lesquelles sont assemblées d'un bout dans la traverse qui porte l'architrave, & de l'autre dans le montant du massif. On doit observer de ne point chantourner le dedans de ces courbes, afin de les rendre plus solides & de les assembler toujours en décharge.

     On doit aussi faire retourner toutes les corniches sur les côtés, & décorer ces dernieres d'une maniere relative à la richesse du reste de l'ouvrage. Il y a des buffets d'orgues dont les côtés sont ornés de tourelles & de plates-faces, ce qui fait très-bien, sur-tout quand ces côtés sont fort apparents. Pour ce qui est du derriere d'un buffet d'orgue, il importe fort peu comment il soit décoré ; pourvu que toutes les parties en soient solides & bien clauses, c'est tout ce dont on a besoin.

     Il faut faire attention que la traverse du bas du bâtis des portes, laquelle regne à la hauteur du dessus de l'architrave, soit d'une seule piece ainsi que cette derniere, ou du moins ralongée à traits de Jupiter si elle est de plusieurs pieces.

     A environ 18 pouces [487 mm.] plus bas que cette traverse, regne un plancher de toute la largeur de l'orgue, qui est porté sur des chevrons qui portent d'un bout dans le mur & de l'autre sur les montants du bâtis ; ce plancher sert aux Facteurs d'orgues pour travailler à l'orgue & à l'accorder. (Voyez les Fig. 1, 2 & 4, Pl. 94)

     En général, quelque soin que les Menuisiers prennent pour faire un buffet d'orgue parfaitement solide, on doit encore en assurer les assemblages par des équerres & des liens de fer, de même que la masse entiere du buffet, qui doit être retenu dans les murs par des tirans & de fortes barres de fer placées en plusieurs sens pour éviter toutes sortes d'ébranlements.

     Je ne donnerai pas d'autre regle que celle que j'ai donnée pour la grosseur des bois des buffets d'orgue, vu que les différentes grandeurs sont trop multipliées. Tout ce que je puis dire, c'est qu'on ne sauroit faire ces ouvrages trop solides. On fera aussi très-bien d'y faire des assemblages doubles, sur-tout aux principales parties ; comme aussi d'y mettre dans les bâtis des écharpes & des croix de S. André, lesquelles empêcheront l'ébranlement, & serviront à retenir les panneaux, telles que celles de la Fig. 3. Quant à ces derniers, on ne peut pas les faire de moins de 9 lignes [21 mm.] d'épaisseur aux plus petits buffets d'orgues, & un pouce & demi [41 mm.] aux plus grands. Quand ces panneaux deviendront d'une hauteur [p. 257.] au-dessus de 6 pieds [1.95 m.], on pourra y mettre de fausses traverses par derriere, lesquelles leur serviront de barres à queues, & retiendront l'écart du bâtis.

     Voilà en général tout ce que les Menuisiers doivent savoir touchant la décoration & la construction des buffets d'orgues, la diversité des goûts & les différentes occasions me mettant dans l'impossibilité d'en donner d'autres regles que de générales : je laisse à la prudence de ceux qui en feront usage, de les appliquer selon que le cas l'exigera. Cependant, je ne saurois trop le répéter, ils ne doivent rien faire, sur-tout quant à ce qui a rapport à la construction, sans être parfaitement d'accord avec le Facteur d'orgues, afin de concourir ensemble à la perfection de ce bel instrument.(****)

PLANCHE 96 & 97.

     Comme, dans les Planches précédentes, je n'ai donné que des développemens servants à faire connoître les principales parties des buffets d'orgues & leur construction, j'ai cru ne pouvoir me dispenser de donner ici le dessin d'un orgue complet, d'une décoration différente de celle qui est usitée ; non pas que je veuille donner cette maniere de disposer les buffets d'orgues comme une chose indispensable ; mais au contraire, je ne la présente ici que comme un conseil & comme une opinion qui m'est particuliere, cette maniere ou l'autre étant indifférente pour la construction intérieure du mécanisme de l'instrument. Voyez la Pl. 96, qui représente l'élévation de ce buffet, & celle 97, qui en représente le plan.

     Dans la description de la Menuiserie des Eglises, je ne suis pas entré dans tous les détails de chaque partie, sur-tout en ce qui a rapport à la construction & à la maniere d'opérer, vû que c'est à-peu-près la même chose à toutes les especes de Menuiseries ; & si quelquefois je l'ai fait, ce n'est qu'autant qu'il m'a été impossible de m'en dispenser ; ce que j'ai dit dans la premiere Partie de mon Ouvrage & au commencement de celle-ci pouvant suffire pour tous les ouvrages possibles. C'est pourquoi si le Lecteur étoit embarrassé à cet égard, il pourroit y avoir recours. Il en est de même pour les Dessins, que je n'ai faits qu'autant qu'ils ont été nécessaires pour l'intelligence du discours, afin de ne les point trop multiplier.(*****)



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Notes de bas de page


(*) Comme les différentes grandeurs des buffets d'orgues pourroient changer quelque chose à leur construction, j'ai cru devoir avertir que ce que je vais dire n'est qu'en général, & que l'on pourra s'écarter des regles que je donne ici, étant des occasions où l'on est borné par la place ou par l'ordonnance du plan.

(**) Dans ce cas, il faudroit que le Facteur posât ses tuyaux dans un renfoncement égal à l'épaisseur de ces claire-voies, afin qu'ils se trouvassent toujours à-plomb.

(***) Je crois que cette maniere de rapporter les lambris sur le massif des buffets d'orgues cintrés en plan & en élévation seroit très-bonne pour tous les autres, sur-tout pour les buffets d'une grandeur considérable, vû qu'on pourroit les réparer avec plus de facilité, & que cette méthode en accéléreroit beaucoup l'exécution, ce qui est fort à considérer.

(****) Il seroit à souhaiter que les Menuisiers & en général tous ceux qui président à la décoration d'un buffet d'orgue, fussent instruits des régles de l'Optique & de la Perspective, afin de donner à l'ensemble d'un buffet d'orgue, ainsi qu'aux parties qui le composent, des grandeurs & des formes relatives à leur élévation & à la distance d'où ils sont vus, ce qui leur seroit d'un très-grand secours, l'expérience faisant voir tous les jours que des desseins de buffets d'orgues, (ainsi que de tous autres ouvrages sujets à avoir des avant & des arriere-corps, & être très-élevés, ainsi que sont ces derniers), que ces buffets, dis-je, sont très-bien dessinés géométralement, & que quand ils sont posés en place, ils font un effet tout contraire, ce qu'on auroit prévu si on les avoit dessinés vus en perspective.

(*****) On sera peut-être surpris que je n'aie fait aucune mention des Œuvres en parlant des Ouvrages d'Eglise ; la raison qui m'a empêché de le faire, est que ces sortes d'ouvrages ne sont susceptibles d'aucune régle constante, & que leur usage est d'un bien plus grand abus que les Chaires à prêcher immobiles ; rien, à mon avis, n'étant si ridicule que de voir dans une Eglise une enceinte, qui (pour séparer quelques Citoyens d'avec les autres) gâte & intercepte une partie de la largeur de sa nef ; de sorte qu'une Œuvre dans une Eglise ressemble tout-à-fait à un comptoir de marchand, ce qui est contre l'ordre & le précepte Divin. Ce n'est pas qu'il n'y ait de très-belles Œuvres ; celle de Saint Eustache, à Paris, est un chef-d'œuvre de Menuiserie quant à la décoration & à l'exécution : mais ce n'en est pas moins un abus pour cela ; c'est pourquoi on m'excusera si je n'ai pas parlé de ces sortes d'ouvrages.





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